Incassable, de M. Night Shyamalan * * *

David Dunn, modeste agent de sécurité dans un stade de Philadelphie, réchappe miraculeusement à un accident de train. Tout le monde est mort, sauf lui. Il n’a pas la moindre égratignure. Ce phénomène se fait contacter par le directeur d’une galerie d’art, maniaque de bandes dessinées, lui-même né avec plusieurs fractures, et dont les os sont fragiles comme du verre…

M. Night Shyamalan est décidément un cinéaste précieux. Si Incassable se cantonne à un ton proche de Sixième sens — probablement son auteur veut-il se rassurer — il confirme le remarquable talent du jeune réalisateur. Il ne faut pas se fier aux explications balourdes qui tentent de cloisonner le sens de la bizarroïde intrigue d’Incassable : Shyamalan scénariste n’est pas sans manies (celle du retournement de situation final, par exemple), et sacrifie même ici à celle, bien américaine, d’absolument tout expliquer dans le dialogue, y compris ce que quiconque aurait compris (cf. les Apparences de Robert Zemeckis). Soyons honnêtes cependant : si la fin est lourdement explicative, elle conserve quelques éléments « ouverts », ceci compensant cela. On regrette cependant les non-dits du précédent opus…

Mais le style très personnel de ce disciple de Spielberg et de Kubrick suggère des rêveries et des interprétations autrement plus profondes, troubles et incertaines, qu’une fable finalement assez manichéenne. Il y a quelques lourdeurs dans Incassable (notamment lorsque les influences de Besson, voire des frères Wachowski, se font un peu trop sentir), et de très nombreux moments de grand style : les deux premiers plans, par exemple, construits parallèlement, sont des plans-séquences qui ont le bon goût de ne pas reposer sur l’affichage de la virtuosité. Shyamalan ose se débarrasser de quelques scènes « à faire » (le déraillement, par exemple) et en traite d’autres de façon inattendue (le sauvetage d’une famille en proie à un tueur sadique, traité de façon « déceptive » et parfois dérisoire). Il parvient à des moments, oniriques et irréductibles, de grand cinéma, qui font le prix d’un film basé plus sur le malaise diffus que sur le suspense d’horloger — denrée suffisamment rare pour être savourée.

Etienne Mahieux

  • BANDE ANNONCE


  • FICHE TECHNIQUE
Titre original : Unbreakable
Pays : Etats-Unis
Durée : 1h46
Sortie française : 27 décembre 2000
Scénario : M. Night Shyamalan
Assistant réalisateur : John Rusk
Production : Barry Mendel, Sam Mercer, M. Night Shyamalan
Décors : Larry Fulton
Photographie : Eduardo Serra
Son : Richard King
Montage : Dylan Tichenor
Effets visuels : Richard R. Hoover
Musique : James Newton Howard

  • DISTRIBUTION
David Dunn : Bruce Willis
Elijah Prince : Samuel L. Jackson
Audrey Dunn : Robin Wright Penn
Joseph Dunn : Spencer Treat Clark
Le dealer au stade : M. Night Shyamalan

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