Jean-Pierre Cassel (1932-2007)

Homme de spectacle complet, fanatique de comédie musicale n’ayant pas trouvé à remplir cet emploi dans le cinéma français, Jean-Pierre Cassel fut l’un des acteurs les plus élégants dans son art et les plus talentueux de sa génération. Il est mort le 19 avril 2007.

Fils d’un médecin et d’une chanteuse d’opéra, Jean-Pierre Cassel (Jean-Pierre Crochon de son vrai nom) s’est destiné au métier d’acteur après son échec au baccalauréat. Il s’inscrit au cours Simon, et fait la connaissance, dans un club de Saint-Germain des Prés, de Gene Kelly, qui lui offre un petit rôle dansé dans son film La Route joyeuse. Jean-Pierre Cassel fait d’autres apparitions modestes ; sa carrière est véritablement lancée en 1960 lorsqu’il incarne le Candide de Norbert Carbonnaux, et que Philippe de Broca, alors débutant, lui offre la vedette d’une série de comédies dont il est le jeune premier aérien.

Jean-Pierre Cassel devient alors rapidement une vedette populaire, et un acteur reconnu dans la comédie. Ses prestations les plus marquantes se font pourtant dans un registre plus grave. De façon presque réflexive, il excelle dans les rôles d’hommes sans histoires, voire superficiels, qui se découvrent dans l’action des qualités insoupçonnées. C’est ainsi qu’il est le Caporal épinglé de Jean Renoir, et le résistant martyr de L’Armée des ombres ou, sur un mode plus mineur, l’officier qui arrête von Choltitz dans Paris brûle-t-il.

La carrière de Jean-Pierre Cassel dans les années 1960 est étourdissante : il réconcilie vieux maîtres (Renoir, René Clair ou Abel Gance) et cinéastes de sa génération (de Broca, Michel Deville ou Claude Chabrol, avec qui il tournera six films), tout en travaillant au théâtre avec Jean Vilar. Il figure, à la décennie suivante, dans Le Charme discret de la bourgeoisie de Luis Buñuel, alignant les collaborations avec nombre de cinéastes importants, à la mesure de son inépuisable gourmandise de travail. Comment tenir quarante ans à ce niveau ? Jean-Pierre Cassel s’est égaré, jusque dans les années 2000, dans des films anglophones de second ou de troisième ordre, et dans des prestations télévisées pour des films pas tous inoubliables. Mais il ne s’est jamais contenté, en revanche, de valeurs sûres, et ce caractère aventureux lui a permis de travailler avec de jeunes cinéastes comme Gérard Mordillat, Mathieu Kassovitz ou Roschdy Zem pour leurs premiers films. Enfin, il a apporté sa contribution, dans des rôles secondaires mais qu’il marquait de son interprétation, à des œuvres aussi réussies que Sade de Benoît Jacquot et La Cérémonie de Claude Chabrol.

Atteint d’un cancer, Jean-Pierre Cassel a travaillé jusqu’à son dernier souffle, ce qui nous promet encore quelques jolies surprises dans les mois à venir. Il devait tourner, cet été, dans un film sur le bandit Jacques Mesrine, interprété par son fils Vincent.

Etienne Mahieux

• FILMOGRAPHIE SELECTIVE

2008
Astérix aux jeux olympiques de Frédéric Forestier et Thomas Langmann

2007
Le Scaphandre et le papillon de Julian Schnabel
J’aurais voulu être un danseur d’Alain Berliner

2006
Congorama de Philippe Falardeau
Mauvaise foi de Roschdy Zem

2003
Michel Vaillant de Louis-Pascal Couvelaire

2001
Rastignac ou les ambitieux d’Alain Tasma (TV)

2000
Sade de Benoît Jacquot
Les Rivières pourpres de Mathieu Kassovitz

1999
Trafic d’influence de Dominique Farrugia
Le Plus beau pays du monde de Marcel Bluwal

1998
La Patinoire de Jean-Philippe Toussaint

1996
Les Bidochon de Serge Korber

1995
La Cérémonie de Claude Chabrol

1994
L’Enfer de Claude ChabrolCasque bleu de Gérard Jugnot
Prêt-à-porter de Robert Altman

1993
Pétain de Jean Marboeuf
L’œil écarlate de Dominique Roulet
Métisse de Mathieu Kassovitz

1990
Vincent et Théo de Robert Altman

1989
Le Retour des mousquetaires de Richard Lester

1988
Mangeclous de Moshè Mizrahi
Chouans ! de Philippe de Broca
Toscanini de Franco Zeffirelli

1986
L’Eté 36 de Yves Robert (TV)

1983
Vive la sociale ! de Gérard Mordillat

1982
La Guérillera de Pierre Kast et Antonio Tarruella
La Truite de Joseph Losey

1981
Nu de femme de Alberto Lattuada et Nino Manfredi
La Vie continue de Moshè Mizrahi

1980
Le Soleil en face de Pierre Kast
Ca va plaire de Jean-Pierre Cassel (TV)

1979
Je te tiens, tu me tiens par la barbichette de Jean Yanne
La Ville des silences de Jean Marboeuf

1978
Les Rendez-vous d’Anna de Chantal Akerman

1976
Docteur Françoise Gailland de Jean-Louis Bertucelli
Folies bourgeoises de Claude Chabrol

1974
Le Mouton enragé de Michel Deville
Le Crime de l’Orient-Express de Sidney Lumet
La Revanche de Milady de Richard Lester

1973
Les Trois mousquetaires de Richard Lester

1972
Le Charme discret de la bourgeoisie de Luis Buñuel

1971
Le Bateau sur l’herbe de Gérard Brach

1970
La Rupture de Claude Chabrol

1969
L’Ours et la poupée de Michel Deville
Ah ! Dieu que la guerre est jolie de Richard Attenborough
L’Armée des ombres de Jean-Pierre Melville

1968
La Double inconstance de Marcel Bluwal (TV)

1967
Jeu de massacre de Alain Jessua

1966
Paris brûle-t-il ? de René Clément

1965
Ces merveilleux fous volants dans leurs drôles de machines de Ken Annakin
Les Fêtes galantes de René Clair

1964
Cyrano et d’Artagnan d’Abel Gance
Un monsieur de compagnie de Philippe de Broca
L’Homme qui vendit la Tour Eiffel de Claude Chabrol (sketch des Plus belles escroqueries du monde)

1963
Nunca pasa nada de Juan Antonio Bardem

1962
La Gamberge de Norbert Carbonnaux
L’Avarice de Claude Chabrol (sketch des Sept péchés capitaux)
Le Caporal épinglé de Jean Renoir
Arsène Lupin contre Arsène Lupin de Edouard Molinaro

1961
Le Farceur de Philippe de Broca
L’Amant de cinq jours de Philippe de Broca
Aimez-vous Brahms ? de Anatole Litvak

1960
Les Jeux de l’amour de Philippe de Broca
Candide ou l’optimisme au XXe siècle de Norbert Carbonnaux

1958
Le Désordre et la nuit de Gilles Grangier
En cas de malheur de Claude Autant-Lara

1957
La Route joyeuse de Gene Kelly
A pied, à cheval et en voiture de Maurice Delbez

1953
Un acte d’amour de Anatole Litvak
La Route du bonheur de Maurice Labro et Giorgio Simonelli