Billy Elliot, de Stephen Daldry * *

Angleterre, 1984. Dans une petite ville minière, la fermeture imminente des fosses provoque des grèves, et un violent bras de fer entre les mineurs et le gouvernement. Etre fils d’ouvrier dans ces circonstances-là ne prédispose donc pas à faire une carrière artistique. Le fils d’un des grévistes les plus acharnés, Billy Elliot, onze ans, pratique la boxe, une activité de « vrai dur » qui se pratique dans le même bâtiment que le cours de danse, que la communauté suppose tacitement réservé aux filles. A l’occasion d’un entraînement un peu tardif, Billy découvre la danse et se sent pousser des ailes. Il sera danseur.

Difficile pour Stephen Daldry, l’un des nombreux piliers du théâtre britannique à avoir récemment empoigné une caméra (cf. Kenneth Branagh, Trevor Nunn, Sam Mendes…), de se dépêtrer des clichés du « mélodrame social », genre très pratiqué outre-Manche (Les Virtuoses, The Full monty, etc., avec de moins en moins d’originalité), et qui constitue une version light des films de Ken Loach. Evidemment l’activité artistique représente un exutoire, et le triomphe final des futurs ou actuels chômeurs ; évidemment le père se rend compte à la quatre-vingtième minute que son fils a du talent et n’est pas forcément p… sous prétexte qu’il danse en chaussons, et ainsi de suite.

Je dois pourtant reconnaître à Billy Elliot une force propre, et proprement cinématographique, qui pallie réellement le manque de conviction dont Stephen Daldry fait montre dans le traitement des figures obligées de son sujet (au point de laisser Gary Lewis cabotiner de façon assez pénible). Aux péripéties psychologiques, il préfère l’évocation de la danse elle-même, dans ce qu’elle peut avoir d’expressif — et réalise de son petit héros un portrait détourné et assez fin. Courir dans les rues de la ville et se bagarrer avec les palissades et les grilles amène assez facilement Billy, comme diraient presque les tchatcheurs d’aujourd’hui, à « danser sa rage ». Qui n’a pas vu les perspectives de briques, soudain illuminées de soleil, parcourues par un gamin danseur, étrange mélange de tableaux de Chirico et de ballet, de Méditerrannée et de Mer d’Irlande, rate quelque chose. Un moment, le souffle des plus belles visions de Fellini plane sur Billy Elliot. Et pourtant Daldry tire à la ligne jusqu’à une fin un peu factice et très politiquement correcte. Mais sa légère schizophrénie (film abstrait sur la danse ou mélo social ?) laisse entrevoir un talent cinématographique véritable. A lui de laisser tomber les bâtons génériques qu’il s’est volontairement mis dans les roues. Remarquons pour finir un autre talent, celui du très convaincant Jamie Bell, danseur de formation, qui donne à Billy une présence véritablement marquante. Débuts encourageants, pour tous les deux.

Cette critique a paru pour la première fois dans
Le Petit spectateur — papier n°91 (Novembre-décembre 2000 / Janvier 2001)

Etienne Mahieux


  • BANDE ANNONCE


  • FICHE TECHNIQUE
Pays : Grande-Bretagne
Durée : 1h50
Date de sortie : 20 décembre 2000
Scénario : Lee Hall
Assistant réalisateur : Marin Harrison
Production : Greg Brenman, Jonathan Finn
Décors : Maria Djurkovic
Chorégraphie : Peter Darling ; extrait du Lac des cygnes chorégraphié par Matthew Bourne
Photographie : Brian Tufano
Son : Zane Hayward
Montage : John Wilson
Musique : Stephen Warbeck

  • DISTRIBUTION
Billy Elliot : Jamie Bell
Jackie Elliot : Gary Lewis
Mrs. Wilkinson : Julie Walters
Tony Elliot : Jamie Draven
Debbie Wilkinson : Nicola Blackwell
La principale adjointe : Barbara Leigh-Hunt
Billy adulte : Adam Cooper

Partager cet Article:

Facebook Twitter Technorati digg Stumble Delicious MySpace Yahoo Google Reddit Mixx LinkedIN FriendFeed

Blogger

3 Commentaires

bonjour a tous sa va moi j'ai trouver votre film super !

J'ai peur que Stephen Daldry ne lise Le Petit Spectateur qu'une fois par millénaire et que ce message ne lui parvienne jamais...

hihi !!! J'adore ta réponse !! :oD

Sinon je donne comme toi deux étoiles, et je n'ai qu'une chose à dire : ce petit Jamie Bell est fantastique.
C'est tout.
Et comme je dis souvent :

c'est pas assez.

;o)

Enregistrer un commentaire