Scoop, de Woody Allen * * *
Woody Allen est décidément insaisissable ; nous venions de le quitter métamorphosé en tragédien faussement cynique, et voici qu’il nous donne ce délicieux petit Scoop, les deux pieds plantés dans sa période précédente, où l’on va se tuer à nouveau, mais cette fois pour rire.
Un journaliste d’investigation reconnu, Joe Strombel, décède prématurément. Sur la barque de Charon (lequel a revêtu les oripeaux médiévaux de la Faucheuse), il apprend d’une assassinée de fraîche date une nouvelle sensationnelle : le tueur aux tarots que tout Londres recherche depuis des mois n’est autre que Peter Lyman, un jeune politicien fils de son père et plein d’avenir. Désespéré d’avoir manqué son dernier scoop, Joe s’échappe à la nage (oui, oui) et, guidé par ses vibrations professionnelles, apparaît à une étudiante en journalisme, Sandra Pronsky, pour lui révéler le « tuyau », au moment même où celle-ci sert de cobaye au prestidigitateur Slpendini. La future professionnelle et le vieux magicien se font alors passer pour père et fille pour approcher Peter Lyman.
Cette comédie policière respecte point par point son double contrat : nous y trouvons de grandes tranches de rire fourrées au suspense, ou l’inverse. Evidemment on ne trouve que peu de scènes qui ne soient pas tournées en référence à un ou plusieurs classiques du genre (Hitchcock est cité tant est plus, notamment, étant données leurs proximités thématiques, Soupçons — verre de lait, escalier… et Les Enchaînés — réception où le secret est dans la cave à vin…) — ou hors du genre (très jolie parodie d’un plan fameux du Mépris, mais non, pas celui de Bardot au lit). Allen fait naître sans peine la tension dès que Lyman est dans les parages, à moins qu’il ne joue à l’aplanir pour mieux faire douter une Sondra emballée par les pectoraux, l’accent britannique et le manoir de notre homme (future professionnelle, j’ai dit). Lorsque ce baratineur de Splendini (évidemment un juif de Brooklyn nommé Sid) domine, en revanche, les dialogues claquent comme des rafales de mitrailleuse. Woody Allen se peint encore une fois en petit artisan écrasé par la supériorité culturelle européenne, condamné à disparaître de par son irréductible américanité (vous verrez). Ce retour explicite aux thèmes d’Accords et désaccords, Hollywood ending ou Escrocs mais pas trop (le personnel dramatique de ce dernier film ayant délicieusement rajeuni — Scarlett Johansson — et traversé l’Atlantique) semble rattacher Scoop à une direction du travail d’Allen que nous croyions épuisée, dans tous les sens du terme, avec Melinda ou Melinda.
Mais non : littéralement cerné par la mort, le film, qui retrouve le calme net et inquiétant de la campagne anglaise déjà rencontrée dans Match point, est une tarentelle napolitaine au pied du volcan, un petit manuel de survie et d’humour en milieu européen, une pochade revendiquée et d’une joyeuse liberté, une respiration, servie par un art on ne peut plus vif de la mise en scène, qui travaille à partir de clichés culturels et visuels (le bateau de la mort !), les détourne, les décadre, parfois au sens propre, leur donne le poids de réalité d’un Londres peu touristique, les rend finalement inquiétants, avant de les faire disparaître dans un éclat de rire.
Date de sortie : 1er novembre 2006
Réalisateur : Woody Allen
Scénariste : Woody Allen
Producteur : Letty Aronson et Gareth Wiley
Coproducteur : Nicky Kentish Barnes et Helen Robin
Producteur exécutif : Charles H. Joffe, Jack Rollins et Stephen Tenenbaum
Directeur de la photographie : Remi Adefarasin
Décors : Philippa Hart
Maquillage : Sallie Jaye
Son : Stephane Malenfant
Chef décoratrice : Maria Djurkovic
Chef monteuse : Alisa Lepselter
Chef costumière : Jill Taylor
Casting : Juliet Taylor, Gail Stevens C.D.G., Patricia Dicerto
Directrices de production : Tori Parry, Helen Robin
Premier assistant réalisateur : Mike Elliott
Régisseur : Francesca Dowd
Régisseur post production : Scott Kordish
Scripte : Kim Armitage
Directeur artistique : Nick Palmer
Décoratrice de plateau : Philippa Hart
Chef accessoiriste : Chris Cull
Chef électricien : Jimmy Wilson
Assistante costumière : Charlotte Sewell
Chef habilleuse : Charlotte Finlay
Ingénieur du son : Peter Glossop
Chef monteur son : Robert Hein
Monteuse dialogue : Sylvia Menno
Monteur effets sonores : Glenfield Payne
Monteur bruitages : Coll Anderson
Bruiteur : Jay Peck
Superviseur effets visuels : Richard Stammers
Création générique : Dickie Etchells
Distributeur : TFM Distribution
Les collègues de Strombel : Robert Bathurst, Geoff Bell, Christopher Fulford, Nigel Lindsay
Joe Strombel : Ian Mcshane
Jane Cook : Fenella Woolgar
La Mort : Peter Mastin
Les passagers avec Joe : Doreen Mantle, David Schneider, Meera Syal
Mike Tinsley : Kevin R. Mcnally
Les fans de Tinsley : Robyn Kerr, Richard Stirling
Sondra Pransky : Scarlett Johansson
Vivian : Romola Garai
La mère de Vivian : Carolyn Backhouse
Jar Spinner : Guo Toa
Le frère de Vivian : Sam Friend
Le maître de cérémonie : Mark Heap
Sid Waterman : Woody Allen
L'assistante de Splendini : Suzy Kewer
Machiniste : Jody Halse
Jerry Burke : Matt Day
Les amateurs d'antiquités : Elizabeth Berrington, Rupert Frazer
L'employé : Christopher Godwin
Peter Lyman : Hugh Jackman
Lord Lyman : Julian Glover
Les invités à la garden party : Paula Wilcox, John Standing
Les joueurs de poker : Sanjeev Bhasker, John Light
Wendy Beamish : Tina Rath
Mr. & Mrs. Quincy : Caroline Blakiston, Richard Johnson
Le maître d'hôtel : William Hoyland
La femme qui hurle : Moya Brady
Les piétons : Rosie Cavaliero, Anthony O’donnell
Mr. Malcolm : Charles Dance
Les locataires : Lynda Baron, Phil Cornwell
Jan : Victoria Hamilton
La bonne : Meg Wynn Owen
Le flic : Alexander Armstrong
L ' inspecteur : Anthony Head
Les passagers avec Sid : Julia Deakin, Margaret Tyzack, Jeffry Wickham
Un journaliste d’investigation reconnu, Joe Strombel, décède prématurément. Sur la barque de Charon (lequel a revêtu les oripeaux médiévaux de la Faucheuse), il apprend d’une assassinée de fraîche date une nouvelle sensationnelle : le tueur aux tarots que tout Londres recherche depuis des mois n’est autre que Peter Lyman, un jeune politicien fils de son père et plein d’avenir. Désespéré d’avoir manqué son dernier scoop, Joe s’échappe à la nage (oui, oui) et, guidé par ses vibrations professionnelles, apparaît à une étudiante en journalisme, Sandra Pronsky, pour lui révéler le « tuyau », au moment même où celle-ci sert de cobaye au prestidigitateur Slpendini. La future professionnelle et le vieux magicien se font alors passer pour père et fille pour approcher Peter Lyman.
Cette comédie policière respecte point par point son double contrat : nous y trouvons de grandes tranches de rire fourrées au suspense, ou l’inverse. Evidemment on ne trouve que peu de scènes qui ne soient pas tournées en référence à un ou plusieurs classiques du genre (Hitchcock est cité tant est plus, notamment, étant données leurs proximités thématiques, Soupçons — verre de lait, escalier… et Les Enchaînés — réception où le secret est dans la cave à vin…) — ou hors du genre (très jolie parodie d’un plan fameux du Mépris, mais non, pas celui de Bardot au lit). Allen fait naître sans peine la tension dès que Lyman est dans les parages, à moins qu’il ne joue à l’aplanir pour mieux faire douter une Sondra emballée par les pectoraux, l’accent britannique et le manoir de notre homme (future professionnelle, j’ai dit). Lorsque ce baratineur de Splendini (évidemment un juif de Brooklyn nommé Sid) domine, en revanche, les dialogues claquent comme des rafales de mitrailleuse. Woody Allen se peint encore une fois en petit artisan écrasé par la supériorité culturelle européenne, condamné à disparaître de par son irréductible américanité (vous verrez). Ce retour explicite aux thèmes d’Accords et désaccords, Hollywood ending ou Escrocs mais pas trop (le personnel dramatique de ce dernier film ayant délicieusement rajeuni — Scarlett Johansson — et traversé l’Atlantique) semble rattacher Scoop à une direction du travail d’Allen que nous croyions épuisée, dans tous les sens du terme, avec Melinda ou Melinda.
Mais non : littéralement cerné par la mort, le film, qui retrouve le calme net et inquiétant de la campagne anglaise déjà rencontrée dans Match point, est une tarentelle napolitaine au pied du volcan, un petit manuel de survie et d’humour en milieu européen, une pochade revendiquée et d’une joyeuse liberté, une respiration, servie par un art on ne peut plus vif de la mise en scène, qui travaille à partir de clichés culturels et visuels (le bateau de la mort !), les détourne, les décadre, parfois au sens propre, leur donne le poids de réalité d’un Londres peu touristique, les rend finalement inquiétants, avant de les faire disparaître dans un éclat de rire.
Etienne Mahieux
- BANDE ANNONCE
- LIENS INTERNET
- FICHE TECHNIQUE
Date de sortie : 1er novembre 2006
Réalisateur : Woody Allen
Scénariste : Woody Allen
Producteur : Letty Aronson et Gareth Wiley
Coproducteur : Nicky Kentish Barnes et Helen Robin
Producteur exécutif : Charles H. Joffe, Jack Rollins et Stephen Tenenbaum
Directeur de la photographie : Remi Adefarasin
Décors : Philippa Hart
Maquillage : Sallie Jaye
Son : Stephane Malenfant
Chef décoratrice : Maria Djurkovic
Chef monteuse : Alisa Lepselter
Chef costumière : Jill Taylor
Casting : Juliet Taylor, Gail Stevens C.D.G., Patricia Dicerto
Directrices de production : Tori Parry, Helen Robin
Premier assistant réalisateur : Mike Elliott
Régisseur : Francesca Dowd
Régisseur post production : Scott Kordish
Scripte : Kim Armitage
Directeur artistique : Nick Palmer
Décoratrice de plateau : Philippa Hart
Chef accessoiriste : Chris Cull
Chef électricien : Jimmy Wilson
Assistante costumière : Charlotte Sewell
Chef habilleuse : Charlotte Finlay
Ingénieur du son : Peter Glossop
Chef monteur son : Robert Hein
Monteuse dialogue : Sylvia Menno
Monteur effets sonores : Glenfield Payne
Monteur bruitages : Coll Anderson
Bruiteur : Jay Peck
Superviseur effets visuels : Richard Stammers
Création générique : Dickie Etchells
Distributeur : TFM Distribution
- DISTRIBUTION
Les collègues de Strombel : Robert Bathurst, Geoff Bell, Christopher Fulford, Nigel Lindsay
Joe Strombel : Ian Mcshane
Jane Cook : Fenella Woolgar
La Mort : Peter Mastin
Les passagers avec Joe : Doreen Mantle, David Schneider, Meera Syal
Mike Tinsley : Kevin R. Mcnally
Les fans de Tinsley : Robyn Kerr, Richard Stirling
Sondra Pransky : Scarlett Johansson
Vivian : Romola Garai
La mère de Vivian : Carolyn Backhouse
Jar Spinner : Guo Toa
Le frère de Vivian : Sam Friend
Le maître de cérémonie : Mark Heap
Sid Waterman : Woody Allen
L'assistante de Splendini : Suzy Kewer
Machiniste : Jody Halse
Jerry Burke : Matt Day
Les amateurs d'antiquités : Elizabeth Berrington, Rupert Frazer
L'employé : Christopher Godwin
Peter Lyman : Hugh Jackman
Lord Lyman : Julian Glover
Les invités à la garden party : Paula Wilcox, John Standing
Les joueurs de poker : Sanjeev Bhasker, John Light
Wendy Beamish : Tina Rath
Mr. & Mrs. Quincy : Caroline Blakiston, Richard Johnson
Le maître d'hôtel : William Hoyland
La femme qui hurle : Moya Brady
Les piétons : Rosie Cavaliero, Anthony O’donnell
Mr. Malcolm : Charles Dance
Les locataires : Lynda Baron, Phil Cornwell
Jan : Victoria Hamilton
La bonne : Meg Wynn Owen
Le flic : Alexander Armstrong
L ' inspecteur : Anthony Head
Les passagers avec Sid : Julia Deakin, Margaret Tyzack, Jeffry Wickham
4 Commentaires
9 juin 2008 à 01:06
Pour ma part, j'ajouterais volontiers une étoile. Il y a effectivement dans Scoop du très bon Woody Allen et du pas mauvais Hitchock... Je ne serais d'ailleurs pas étonné que la clé et le verre de lait (ceux qui ont vu le film comprendront) soient des clins d'oeil au Crime était presque parfait et à la Maison du Dr Edwardes.
9 juin 2008 à 01:10
Quand notre coeur fait Scoop !
Après la superbe tragédie Match point, Woody Allen reste à Londres, mais nous propose cette fois une comédie très agréable, avec la belle Scarlett Johansson, toute sage en journaliste débutante, et Woody lui-même en Houdini de banlieue.
L'histoire est assez compliquée et invraisemblable pour qu'on ne rentre pas dans les détails. Disons pour faire court que nos deux lascars se font passer pour père et fille pour infiltrer le Grand Monde dans une enquête du plus haut comique (Woody Allen en bègue gaffeur est irresistible). Et il est vrai qu'on rit beaucoup dans Scoop. Les dialogues sont allenesques et le rythme joyeux. Se cachent là-dessous une sombre histoire de serial-killer, des tours de Magie et un plan angoissant à la Hitchcock (le bateau sur le lac), avant le happy-end attendu.
J'ai trouvé la fin un peu bâclée, mais il est vrai quà partir de la découverte de la clef, une vraie, tout est dit et le suspense se dégonfle...
A voir malgré tout, pour le plaisir.
9 juin 2008 à 01:11
J'ai été absolument enchantée par ce film, drôle, rythmé, bien ficelé !
Je suis d'accord avec Françoise B. : la fin est un peu bâclée : dès lors que le voile de l'intrigue tombe, pas moyen de tergiverser, une fin rapide s'impose... Mais cela n'enlève rien au charme du film.
La scène du bateau rappelle effectivement le Lifeboat d'Hitchcock (plans serrés, nuit, brouillard, une poignée d'individus qui ne se connaissent ni d'Eve ni d'Adam et qui, faute de mieux, discutent pour passer le temps, un capitaine pour le moins terrifiant - le nazi dans Lifeboat, la Mort dans Scoop ! ...enfin j'arrête là la comparaison, j'extrapole un tout petit peu !)
L'ombre d'Hitchcock plane sur le film, et nous avons le plaisir de retrouver du vrai, du BON Woody Allen !!
Alors... si vous n'avez pas vu Scoop, courez-y !
PS : une de mes répliques favorites, prononcée par Woody Allen : "Je suis issu d'une famille pratiquant le judaïsme, mais je me suis converti au narcissisme !" :oDD
9 juin 2008 à 01:12
Une autre réplique en V.O. parce que tout est dans le rythme : "I'm tired, I'm bored, I'm hungry, I'm going home."
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